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Les échos de Valclair

Derniers commentaires
1 juin 2012

Donc, me revoici...

Je disais que je reviendrais peut-être. C’est fait.

Cela s’appelle « Chroniques ». Titre on ne plus banal et neutre. Mais c’est voulu, un terme qui évoque sans doute moins qu’« Echos » les vibrations intérieures. Ce sera un regard subjectif bien sûr mais plutôt tourné vers le dehors. Sans exclure cependant de parler aussi d’un soi plus intérieur mais sûrement de façon plus distanciée qu’ici. Et comme je le disais d’ailleurs dans l’exergue même de ce blog ci « l'intime se dessine à travers le quotidien, livres lus, films vus, réflexions sur la littérature et l'écriture ». Mais je parle désormais sous mon nom propre et plus sous pseudonyme.

Je donne le chemin d’ici vers là-bas. Mais je ne donne pas et ne souhaite pas qu’on donne le chemin de là-bas vers ici. Je laisse mes archives en ligne parce que j’aurais trop de mal au geste brutal de les effacer qui me paraitrait comme un déni de toutes ces années d’écriture. Et aussi parce qu’il ne me déplait pas que des lecteurs de hasard puisse encore venir s’y promener et y trouve, pourquoi pas, des textes qui leur parlent. Mais je ne souhaite pas aiguiller systématiquement les nouveaux lecteurs que j’aurai sur les Chroniques vers les Echos.

J’ai démarré depuis presque un mois (au temps lointain où on était encore sous Sarkozy !). Je n’avais pas encore fait le pas de l’annoncer ici. Signe que je ne suis pas sûr de moi. C’est que, pour le moment, je ne suis pas bien sûr de l’aimer mon nouveau blog. Or si je ne l’aime il faudra savoir l’arrêter. Ça ne me plairais pas trop me donner le ridicule d’arrêter peu de temps après avoir dit que je reprenais. Tant pis je prends le risque…

Ah, j’allais oublier, c’est ici…

 

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26 décembre 2011

Fin d'année, fin de blog

Voilà, l’année se termine. Moment symbolique s’il en est ! Moment alors où tenter d’écrire ce billet qui est au bord des mots depuis des semaines mais qui jamais ne vient, ce billet pour clore.

Car il faut clore vraiment. J’ai commencé ce journal en ligne le 1° janvier 2003, cela fait donc neuf années de diarisme en ligne, enfin disons huit et demi puisque de fait je me suis quasiment arrêté au mitan de cette année. J’ai dit déjà ma distance d’écrire, mes envies qui parfois resurgissent sans que j’aille au bout, la mélancolie que j’ai parfois de cette aventure qui s’achève.

Mais elle s’achève sous cette forme en tout cas et il vaut mieux en marquer la fin plutôt que de rester dans l’indétermination de l’éventuel billet à venir.

Plusieurs fois des amorces de billets ont surgi, certaines sur l’ordinateur, quelques lignes seulement, d’autres seulement griffonnées sur un carnet ou une feuille volante lors d’un réveil intempestif.

Je les reprends aujourd'hui, non pour tenter de les réécrire, ça n’aurait pas de sens, juste pour en poser trace au moment de fermer boutique. En quelque sorte les billets auxquels vous avez échappé et moi avec vous, et dont voici ce qu’auraient pu être les titres :

Anniversaire : là bas dans la maison du midi j’ai eu un méchant de coup de blues à l’approche de mon anniversaire (ou au lendemain je ne sais plus). S’y mêlait le temps qui passe et ne revient pas, des petits soucis de santé sans gravité mais signes irrévocables de vieillissement, peut-être aussi quelque chose d’une sorte de dépression post-partum à être dans la maison enfin terminée et sans plus être porté par les soucis et le projet de sa rénovation. Quelques pages écrites au bord du lit dans l’angoisse de l’insomnie, mais pas reprises et même détruites peu après, il n’y a pas de sens à ces ruminations.

Sous la pluie : au cours de ce même séjour une promenade en solitaire juste pour aller respirer un jour de très mauvais temps, une certaine exaltation qui m’est venue, des mots, des phrases entières qui ont surgies dans le rythme même de la marche, décrivant le paysage noyé de pluie et mes ressentis mais que je n’ai pas pris le temps de poser lorsque je me suis retrouvé au sec à la maison.

Doubrovsky : de passage à Ambérieu début novembre pour diverses tâches à effectuer pour l’APA, j’en profite pour assister à une rencontre avec Serge Doubrovsky dans le cadre de la semaine « Ecrire sa vie » qu’organise chaque année la municipalité. Moment très intense. On voit d’abord ce vieil homme qui parait très fatigué, presque chancelant, on se demande comment il va pouvoir articuler les mots d’une longue intervention et puis c’est la magie de sa parole, il semble renaître à mesure qu’il parle, ses mots sont de plus en plus percutants et chargés d’émotion et lorsqu’il lit, la voix nouée, les dernières lignes d’Un homme de passage nos yeux se brouillent. On sent alors à quel point son écriture lui est vitale, on ressent son absolue authenticité, très éloignée du narcissisme et de la complaisance que certains lui reprochent.

Promenade : à Paris cette fois, une excursion dans un quartier où je ne vais pas souvent, les Hauts de Belleville. Rue Piat, une bouffée de souvenirs, j’ai tenté de retrouver le lieu précis où, pendant un temps, je venais souvent mais sans succès, l’immeuble peut-être a été détruit et remplacé par des constructions modernes. Promenade ensuite dans le beau parc aussi qui désormais dévale la pente de la colline et qui alors n’existait pas. Je me suis posé sur un banc et j’ai commencé d’écrire. Avant de partir, signe que je me sentais des envies d’écrire, j’avais rechargé un nouveau carnet dans un cher petit étui, joli souvenir de blogosphère. Mais le temps s’est fait menaçant, je n’ai pas terminé, je n’ai pas eu envie de m’asseoir dans un café, je n’ai pas repris à la maison.

Couriel : ma boîte Valclair ne reçoit plus de mail si ce n’est des spams. Je vais y jeter un œil de loin en loin, histoire de faire le ménage et avec l’espérance que tout de même quelqu’un m’ait écrit. C’était le cas justement. Un mail d’une lectrice que je ne connais pas « in real life » comme on dit,  et avec laquelle j’ai échangé très épisodiquement. Ça m’a fait très plaisir. Ça m’a donné envie d’écrire un billet mais il n’a pas vu le jour. Quel sens cela aurait-il eu un billet isolé, parlant de la nostalgie de mon blogomonde, de ce qui s’y nouait d’amitiés, de tendresses, voire de secrets fantasmes ?

Bouffées de rêves : ils sont venus en pack comme souvent. Pendant deux-trois jours je m’éveille à plusieurs reprises sur des rêves, alors que je peux rester plusieurs semaines sans m’en souvenir d’aucun. J’en ai noté trois au coin du lit. Je ne les ai pas retranscrits sur l’ordinateur dans les heures qui ont suivies. Aujourd'hui j’ai relu ces griffonnages. Mais c’est trop tard. Il n’y a plus qu’un squelette, les images elles-mêmes ne reviennent pas qui permettraient de raconter le rêve (de croire le raconter ? de le réinventer ?). L’un était très doux, pas érotique mais doucement sensuel, les deux autres étaient des cauchemars dont l’un surtout a laissé en moi une trace pénible pendant les premières heures de ma journée.

Cinéma : Arrivé en fin d’année j’ai jeté un œil sur ma liste de films vus. Je fais ça, un petit mémento, juste pour me souvenir, maintenant que je ne tiens plus chronique en ligne de mes principaux films vus. Je mets une appréciation, sans faire de classement. J’ai vu 57 films en 2011. A peu près comme en 2010 (58, je viens d’aller voir). C’est curieux, j’aurais pensé en avoir vu plus cette année, par effet retraite, mais non finalement. Je place au sommet pour cette année sans les classer : Incendies, Tomboy, Le gamin au vélo, Mélancholia. Et je pense Shame vu tout récemment. Shame fait partie de ce genre de films que l’on n’apprécie pas forcément énormément au moment où on le voit parce qu’il met mal à l’aise mais dont la puissance s’affirme progressivement, tout à l’opposé de certains films plaisants sur l’instant mais qu’on oublie vite. J’ai bien apprécié aussi, mais un cran au-dessous : Winter’s bone, Le discours d’un roi, La conquête, Hors Satan, Il était une fois en Anatolie, les neiges du Kilimandjaro, Donoma, Le Havre, ce dernier vu ce soir.

Liseuse : ça y est, je viens de m’acheter une liseuse. J’ai chargé quelques titres sur publie.net. A priori la lecture est agréable, il n’y a pas cette fatigue oculaire que génère la lecture sur écran d’ordinateur. Mais je ne sais pas encore vraiment ce que je pense de ce mode de lecture, moi grand amateur de livre-papier mais écrasé aussi par les amoncellements de ma bibliothèque. C’est à voir à l’usage. Voilà qui sûrement mériterait d’être chroniqué.

Je m’arrête là. Sur l’idée d’une chronique méritant d’être écrite ! Signe que je reviendrai peut-être. Mais si je reviens ce ne sera pas ici. Ce ne sera pas Valclair. Valclair c’est fini. Ce blog restera en ligne. Du moins pour le moment. Il ne sera plus alimenté, cette fois définitivement. Je viendrai seulement donner une nouvelle adresse, si nouvelle adresse il y a, si certains souhaitent m’y suivre.

A toutes et à tous, qui passeront ici, amies et amis, lecteurs anciens ou visiteurs de passage voire de hasard, je souhaite de belles choses pour l’année qui vient. Et j’adresse mes pensées plus particulières à celles et ceux que j’ai longuement croisé dans les mots ou en réelle présence au cours de ces années. A tous ceux-là, sans m’avancer sur ce que l’avenir réserve, je voudrais oser dire tout de même : A bientôt !

 

9 octobre 2011

Après un mois

Et un peu plus même…

Un mois de silence, un mois d’abstinence d’écrire…

Dernière note : 28 aout ! Le mois de septembre entièrement sauté et octobre déjà à son tiers ! C’est la première fois, depuis janvier 2003, date à laquelle j’avais commencé ce journal en ligne, que je suis passé par-dessus un mois entier, sans écrire un mot, sans la moindre entrée. Je n’ai pas écrit en ligne mais pas plus non plus dans le privé de mon ordinateur. Normal me direz-vous. J’avais dit que j’arrêtais. Et c’est donc ce que je fais mais avec une facilité qui m’étonne moi-même. Je m’attendais à ce qu’il y ait des retours de flamme écrivante, des retours d’envie de titiller le clavier. Il n’en a rien été ou à peine.

C’est le moment de latence que m’offre ce matin un voyage en TGV qui me fait dire : tiens, ce pourrait être le moment de faire le point pour moi-même et puis aussi, et puis surtout, pour faire un signe à mes lecteurs, à mes amis.

A quelques moments, si, j’ai eu des velléités d’écrire. Telle impression de l’instant devant un ciel ou un paysage, à la sortie d’une lecture ou d’un film, lors d’un réveil nocturne impromptu, lors de ma dernière journée au travail, lorsque après avoir achevé mes rangements et mes tris, je suis resté un long moment méditatif dans le bureau déserté avant d’en clore la porte ou bien encore lorsque, allongé au bord d’un lac et profitant des douceurs de cette superbe arrière saison, j’ai pensé à mes petits camarades qui devaient être en réunion de rentrée…

Mais justement, ce ne furent que des velléités. Des mots me sont venus et des bouts de phrases. Mais je n’ai pas même été jusqu’à les écrire dans un carnet ou sur mon ordinateur. Ils se sont alors rapidement dérobés, ils ont quitté mon esprit avant que je prenne le temps de les poser, de les organiser, de les travailler. La volonté, la motivation ont fait défaut. Je me dis alors qu’ils n’avaient surgis que par automatisme, par réflexe, comme trace d’une habitude mentale que j’avais peu à peu contractée lorsque j’avais le souci d’écrire. Une habitude d’ailleurs que j’avais souvent jugé envahissante, celle qui fait que l’on ne ressent plus les choses pour elles-mêmes mais au travers des mots que l’on en tirera un peu comme un photographe qui finit par ne plus voir le paysage qu’au travers du cadrage de l’image qu’il pourrait en tirer. (C’est vrai cela mais est vraie aussi l’idée que parfois les mots auxquels on s’efforce contribuent à enrichir le réel perçu).

L’instant d’ailleurs… Les tâches blanches des charolais sur le vert des prairies vallonnées… Des effets de lumière assez somptueux et sûrement très éphémères entre bancs de brume et déchirures soleilleuses… C’est beau !

Le rapport aux personnes est ce qui, par moments, me donnerait des envies de revenir, d’écrire pour communiquer. Je ne lis presque plus de blogs et, d’ailleurs la plupart de mes blogamis et blogamies se sont eux aussi éloignés ou, à tout le moins, raréfiés. Il n’y a pas de mystère. Les relations non entretenues se distendent. Ce qui est valable pour les amitiés classiques, l’est tout autant, ni plus, ni moins, pour les amitiés internautiques. Et, bien sûr, cela rend un peu triste. Mais, de-ci, de là, je vois la trace d’un retour, le commentaire d’un ancien vient me titiller, ou au contraire c’est le passage d’une nouvelle lectrice qui m’émeut en me disant son regret de me voir partir au moment où elle me découvre. Tous ces commentaires, auxquels je n’ai pas même répondu, m’ont été doux, sachez-le. Et puis, il y a eu aussi la semaine dernière cette rencontre dans le réel dont je remercie l’initiatrice et qui a ravivé avec plaisir le temps ancien d’un certain someone carnet.

Vagues regrets donc du temps qui n’est plus de ma blogosphère vivante, envie fugace de la réactiver. Mais conscience aussi qu’elle ne pourrait revivre de la même façon, avec les mêmes engouements, les mêmes enthousiasmes, les mêmes désirs. Je voudrai retenir ce qui s’éloigne, ce que le temps implacable efface mais je sais bien que ce n’est pas possible.

L’écriture pour elle-même en tout cas ne me manque pas. Cette abstention d’écrire s’est inscrite dans une lassitude déjà bien ancrée mais tout de même qu’elle se soit radicalisé au moment même où j’ai arrêté mon activité professionnelle n’a pas manqué de m’interroger. En commentaire de mon précédent billet certains s’étaient questionné sur cette concomitance (Pierre, Gilda). Ce n’était pas voulu et ça m’a surpris moi-même. L’hypothèse de Gilda est assez juste je crois, mon écriture était aussi un exutoire ou plutôt un supplément d’âme à une activité professionnelle quotidienne ne m’apportant pas tout ce dont j’avais besoin en terme d’expression de soi et de créativité. J’ai moins besoin désormais de cette compensation, du moins pendant ce temps un peu suspendu et sans doute indispensable où il me faut trouver mes marques dans cette nouvelle organisation de vie, débarrassée des contraintes du travail obligé.

Mais que fais-je alors de mes jours de jeune retraité ? Les jours passent aussi vite, je me sens aussi occupé que lorsque je travaillais. Par moment je me demande ce que je fais de tout ce temps libre. Certes j’ai encore renforcé mon intervention dans l’association de collecte autobiographique que je contribue à animer. J’ai aussi passé beaucoup de temps à mettre de l’ordre dans les accumulations non traitées depuis des années qui encombraient mon appartement et utilisé assez largement poubelles et ventes en vide-grenier pour ce faire. Et ce boulot là, d’indispensable allègement, est loin d’être fini ! Nous sommes retournés aussi quelques jours dans notre maison du sud. Mais à part ça pas grand-chose, aucun grand chantier nouveau, aucune de ces choses dont on se dit : « ah oui, pour le moment je n’ai pas le temps, je n’ai pas la disponibilité d’esprit mais quand je serai à la retraite, alors là, on va voir ce qu’on va voir ».

Les deux récits fictionnels (enfin semi-fictionnels), un peu plus longs et ambitieux que de simples nouvelles et dont j’ai les sujets en tête depuis plusieurs années n’ont pas connu la moindre once de début de réalisation. Mais ils sont toujours là, au fond de moi. Peut-être les écrirais-je. Peut-être pas. Mais je n’ai pour l’instant, ni le souci de les écrire, ni le regret de ne pas le faire.

Quant à l’idée de créer un nouveau blog, cela reste aussi une possibilité vague. Je ne me suis pas encore penché sur le contenu et la forme que je lui donnerai. Laisser Valclair sans doute pour mieux renaître dans un blog sous mon nom d’état civil articulé avec mon activité publique, maintenant que celle-ci ne se partage plus en deux sphères, l’écrivante et l’associative d’un côté, la professionnelle de l’autre, deux sphères que je souhaitais absolument sans contact l’une avec l’autre. Mais Valclair c’était d’autres choses encore, des considérations aux frontières de l’intime qu’un blog à mon nom pourrait plus difficilement accueillir, une convivialité particulière née justement de ces échanges aux frontières, voire au profond de l’intime. Si je me lance, ce qui n’a rien de certain, il me faudra là-dessus, trouver le bon réglage.

Pas de regret, pas de frustration pour l’instant, à cette lenteur. Peut-être est-ce cela d’ailleurs pour le moment le bonheur de cette nouvelle période : un rythme plus doux, le sentiment qu’il n’y a pas à se bousculer. Et lorsque je déjeune à la maison, le plaisir ensuite de la sieste ! Oh une courte sieste, une demi heure en général, un quart d’heure de lecture, un quart d’heure d’assoupissement qui me tombe dessus sans que je puisse résister et dont j’ai l’impression qu’il me fait un bien fou. J’adore ce moment où, sortant de table, à l’heure qui était celle il y a peu de rendez-vous ou de réunions, je m’allonge voluptueusement sur mon lit avec un bon livre.

En tout cas, au-delà même du temps réapproprié, ma liberté d’esprit est le grand bénéfice de ma nouvelle situation. Je me rends compte par contraste à quel point mon travail était présent en moi, même sorti du bureau. Pourtant je n’avais pas des horaires démentiels, je me ramenais pas de dossiers du bureau, j’avais l’impression, sauf exception, de penser rarement à mon travail pendant mes week-end ou mes vacances, mais la préoccupation en était là tout de même, de façon permanente, en arrière fond, dans l’inconscient ou le semi-conscient. Quelle libération de s’en sentir totalement dégagé.

Ecrit dans le TGV mercredi, retranscrit et complété hier soir et aujourd'hui (le délai en lui-même en dit long !), et publié pour vous, mes lecteurs, mes amis, pour vous faire un petit salut, un petit signe amical, pour vous dire que Valclair, encore, de temps en temps, pense à vous…

Bon, c’est pas tout ça. Faut que je file déposer mon bulletin dans l’urne pour la primaire. Après moult hésitations finalement ce sera Martine…

 

28 août 2011

Flottement

 

Je suis revenu à Paris depuis presque une semaine. J’ai repris le travail depuis quelques jours et pour quelques jours encore, jusqu’à mercredi et puis ce sera la quille…

Je me suis connecté deux, trois fois en juillet, pas du tout en aout. Cela ne m’a pas manqué. Pas du tout. Je me suis reconnecté bien sûr dès mon retour, pour aller voir mes mails, pour gérer quelques affaires en cours. Mais, jusqu’à hier soir, je n’avais pas poussé la porte du blogomonde. Pas ouvert mon blog, pas ouvert mon agrégateur, pas ouvert à fortiori mes blogs favoris ! Je m’en étonne moi-même. C’est comme ci tout un pan de ma vie au cours de ces dernières années était passé à la trappe brusquement, sans regret et sans faire résistance, comme si la page d’elle-même s’était tournée et brutalement refermée. Sans regret ? Et pourtant non, ce n’est pas si simple…

Hier soir donc j’ai replongé le nez chez mes blogamis mais au départ, presque en m’y forçant, en me disant : mais ces personnes dont tu apprécies l’écriture, ces gens que pour certains tu connais et que tu aimes, que deviennent-ils, au moins il te faudrait prendre de leurs nouvelles... Donc j’ai surfé, j’ai parcouru mes liens, survolé le plus souvent et parfois lu attentivement, j’ai eu des nouvelles des uns et des autres, parfois de bonnes et parfois de beaucoup moins bonnes. J’ai vu se confirmer des éloignements de la toile plus ou moins radicaux mais constaté aussi des retours et vus que certaines plumes étaient toujours bien vaillantes. J’ai pris plaisir à ce parcours au départ un peu forcé. Et puis m’est revenue l’envie de poser mes mots moi aussi. Aujourd'hui Constance allait déjeuner chez sa mère, je devais l’accompagner mais finalement je l’ai laissé partir seule, j’ai préféré rester paisiblement avec moi-même, prendre mon temps pour baguenauder dans le blogomonde et titiller le clavier. Je me suis juste aéré d’une promenade aux Tuileries et d’une visite de la belle exposition des autoportraits de Claude Cahun et, dans la foulée, de l’autre exposition du Jeu de Paume, les photographies, fort intéressantes aussi, quoique dans un tout autre genre, de Santu Mofokeng.

Mon été a été plutôt paisible, sans rencontres marquantes, sans grand voyage, sans grands travaux de quelque ordre que ce soit. J’ai lu un peu mais pas tant que ça. J’ai écrit un peu mais pas tant que ça non plus et rien de vraiment de personnel. J’ai laissé couler le temps, je l’ai laissé filer comme sable entre mes doigts. Mais sans vivre cela mal pour autant. Est-ce besoin, l’âge venant, de fonctionner en tout sur un tempo plus lent ? Ce qui en soi, d’ailleurs n’est pas un mal, ralentir, prendre le temps, dans notre société de stress généralisé. Est-ce une tendance à la procrastination parce qu’on a l’impression, illusoire évidemment, que, puisqu’on est à la retraite, on a le temps ? J’ai deux-trois vagues projets d’écriture qui me tourniquent dans la tête depuis des années et dont je me disais : on verra ça plus tard, ce sera un beau projet pour la retraite. J’y suis ou quasiment. Et les projets semblent se faire plus distants, évanescents, comme des mirages qui s’effacent au moment où on croirait pouvoir les toucher. Mais peut-être est-ce provisoire, peut-être est-ce que j’ai juste besoin de trouver mes marques au moment de ce changement de vie qui, même si on l’appelle de ses vœux depuis longtemps, n’est pas pour autant anodin et ne peut que secouer en profondeur ? Ou peut-être n’est-ce qu’une chimère qui se dissout ? Je m’inventais peut-être le besoin de me réaliser « un jour » par l’écriture d’une « œuvre » ou au moins d’une oeuvrette, pour compenser l’aspect insuffisamment créatif et valorisant de mon travail quotidien. Je me dis que si j’avais vraiment porté une œuvre en moi, je l’aurais certainement déjà écrite. Ce qui ne m’empêchera pas quelques petites écritures plaisir j’imagine. Je sais bien que j’aime écrire et que, lorsque je parviens à m’y mettre, j’y trouve du bonheur, j’en vois l’exemple même dans cette journée et cette soirée d’aujourd'hui.

Mais je sais, que ce genre de considération je les ai déjà faites plus d’une fois, ici ou là sur ce blog, signe encore que, sous cette forme, il a fait son temps !

Bien sûr ce qui retient encore ce sont ces liens ténus avec les blogamis qu’on ne voudrait pas tout à fait perdre et qui pourtant se perdent. Bien sûr je n’ai presque plus de commentaires et pour cause puisque je n’écris presque plus de billet ! Mais même ma boîte mail reste vide et les quelques correspondances nouvelles qui s’étaient installées dans la dernière période en marge du blog se sont éteintes une à une. On peut se dire : je garderai le contact autrement. L’expérience prouve que c’est difficile. Je vois bien que depuis que je vais lire les autres de façon très espacée, ils s’éloignent de moi, ils s’éloignent en moi à grande vitesse. Rarement mes pensées se tournent vers eux, y compris pour certains qui ont pourtant beaucoup compté. Il y a des exceptions mais rares, lorsque les relations sont vraiment passées sur d’autres plans et qu’elles perdurent au travers d’activités et d’engagements associatifs communs.

Malgré cela, malgré ce regret que je ressens, vraisemblablement je n’écrirai plus ici. Regret aujourd'hui parce que j’ai fait cette petite plongée blogosphérique ce week-end, comme un retour vers le passé, mais il n’était pas là, ce regret, au long de l’été ni durant cette première semaine parisienne ! Je ne jure de rien. Peut-être éprouverais-je le besoin à un moment ou un autre de déposer une page ici et je ne m’en priverai pas alors. Je ne sais pas comment tout ceci évoluera passé ce temps de flottement. Il est possible aussi que j’ouvre un autre blog, ailleurs, différent, sous mon nom d’état civil et plus directement articulé avec mon activité publique. Quand ? Dans six mois ? Dans un an ? Je ne sais pas. Jamais peut-être !

Je ne suis pas prêt cependant à tuer complètement Valclair, à faire ce clic fatal de destruction du blog et d’élimination de toutes les archives. Plus d’un l’ont fait et la découverte de la page nue, aussi à distance que je sois, m’a fait un choc. Non, je n’arrive pas à tuer Valclair. Je vais me contenter de le laisser à sa léthargie profonde. Valclair au bois dormant ! C’est joli ça. Peut-être, qui sait, attend-il qu’une princesse, d’un baiser, vienne le réveiller ?

Blague à part, même si je ne suis pas prêt à cette élimination radicale, je comprends ceux qui l’ont fait. C’est éviter de laisser des mots que l’on a mis à distance de soi à portée du premier venu, du passant de hasard, c’est marquer que la page est non seulement tournée mais le livre fermé et une assurance pour soi de ne pas y revenir. Peut-être le ferais-je, mais plus tard et pas avant en tout cas la prochaine tournée du robot de la BNF pour qu’au moins il reste trace quelquepart des dernières pages de ce blog.

C’est drôle, quoique en partance, j’ai tout de même éprouvé le besoin de mettre à jour ma liste de billets, de faire un ménage dans mes liens, ne gardant que ceux qui publient encore avec suffisamment de consistance. Comme si j’avais besoin, en garçon studieux, de laisser le cahier bien au net.

Allez, mes ami(e)s, au-revoir encore...

Je m’éternise, comme si finalement, j’avais du mal, ce soir, à vous quitter…

Gardez Valclair dans vos agrégateurs, on ne sait jamais, et puis, si je renais ailleurs, je ne manquerai pas de venir vous en informer ici…

 

10 juillet 2011

Au revoir

 

Voilà je boucle mes valises.

Je pars demain dès l’aube.

Peut-être que ceci est mon dernier billet. Mais sans doute pas. Je serai de retour à Paris vers le 20 aout pour une dernière semaine de travail professionnel. J’aurai sans doute envie de faire un petit point sur mes réflexions estivales, sur les idées que j’aurai peut-être d’ici là sur la façon dont ensuite peut-être je continuerai à m’exprimer ici ou là. Mais je sais que la décision de fermeture de ce blog est irréversible et que je m’y tiendrai, même si ce n’est pas si facile à faire et que, alors que je ressens de la joie à tourner une page, j’en ai aussi des regrets.

Pour le moment en tout cas je vous souhaite à toutes et tous le meilleur pour les semaines à venir et vous dis « à bientôt » d’une façon ou d’une autre.

 

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7 juillet 2011

Dernières fois

 

 

Ces jours-ci je ne cesse d’accomplir des choses pour la dernière fois !

A vrai dire notre vie est largement faites de dernières fois mais le plus souvent on ne se pose pas la question : ce pays ou cette ville que l’on visite y retournera-t-on jamais, ce film que l’on voit, ce livre que l’on lit, le reverra-t-on, le relira-t-on un jour, cette personne à laquelle on dit « au revoir » la croisera-t-on à nouveau ? Et heureusement d’ailleurs qu’on ne se pose pas sans cesse la question et que la vie se file comme elle vient et non dans la sombre lumière de sa finitude.

Mais il est des moments où la pensée de la dernière fois ne peut pas ne pas s’inviter. Elle pare alors l’instant, non de tristesse mais d’une sorte d’aura douce et un peu mélancolique. Et, bien sûr, les jours où l’on s’apprête à terminer sa carrière professionnelle font partie de ces moments.

Aujourd'hui dernier dossier bouclé pour un consultant, dernière signature apposée sur un avis donné. Maintenant j’en suis au rangement de mes dossiers et de mes armoires. Beaucoup de classement vertical. Tant de choses accumulées au cours des années et dont beaucoup auraient dû être dégagées depuis longtemps. En passant je retrouve des vieux documents, certains me rappellent des moments difficiles, d’autres des succès et de belles réalisations.

La semaine passée, dernière vague de ces réunions rituelles typiques de la fin de l’année où élèves et familles demandent la révision de décisions scolaires prises par les établissements. Depuis des années j’ai siégé de nombreuses fois dans ce genre de commissions. Ces réunions sont lourdes, parfois très longues, souvent pénibles, on ne peut s’empêcher dans bien des cas de douter du bien fondé des décisions que l’on y prend. Parfois le travail s’y fait dans l’harmonie et dans un bon climat de dialogue, dans l’écoute bienveillante mais d’autres fois ce n’est pas le cas et ces réunions peuvent alors être bien pénibles. Fort heureusement cette dernière commission s’est bien passée, je suis content de terminer sur cette note là, dernier cas traité, nous ne terminons pas trop tard, c’est agréable je vais pouvoir profiter de ma fin d’après-midi que je craignais devoir être blindée, je range mes petites affaires dans ma sacoche, je serre la main des différents participants, ils ne savent pas mais moi je sais que c’est ma der des der, je sors dans l’après-midi finissante, allègement, soulagement, et en même temps, bien présente, cette mélancolie des dernières fois.

Et puis encore le repas de fin d’année des principaux et proviseurs des établissements de mon secteur. Chaque année il se fait dans un lycée différent mais cette année il se trouve que ça se passait dans un célèbre établissement sur la Montagne, celui-là même où j’ai été élève il y a quelques décennies. Il faisait bon, nous avions installé les tables dans la cour du collège, ex petit-lycée, je revois très précisément l’endroit où étaient tracées des lignes avec le numéro des classes où, en ce lointain jour de septembre, petit gamins émus et un peu anxieux, nous devions aller nous mettre en rang, pour moi sur la ligne de la classe de 6°A 2, en attendant le professeur qui allait nous prendre en charge. Je suis revenu dans ce lycée à plusieurs reprises au cours de ma carrière professionnelle et aussi en tant que parent d’élève quand mes fils y étaient. Mais plutôt côté lycée, jamais dans cette cour de collège. Et il est bien vraisemblable que je n’y mettrai plus jamais les pieds. J’ai été très heureux que cette petite fête se passe là, j’en ai ressenti une véritable émotion, la boucle est bouclée… Je suis parti dans les derniers, j’ai retraversé seul le lycée, j’ai marché très lentement dans les cours et les couloirs pour rejoindre la sortie. Je me suis arrêté un bref moment dans la cour d’honneur, contemplant les bâtiments, la tour se détachant sur le beau ciel nocturne et je me suis laissé assaillir par mes souvenirs. Puis je suis sorti et c’était fini, le moment était clos et pour le coup j’ai ressenti un pincement un peu douloureux. Je suis rentré à la maison à pied, prenant le temps, descendant la rue Mouffetard, remontant les Gobelins : terrasses débordantes, jeunes gens joyeux, filles légères, couples qui s’embrassent, et moi je passe, me disant que je reprendrais bien le film là où je l’avais laissé en ce temps là, que je referais bien le chemin. Difficile de ne pas avoir un peu le blues, mais en même temps c’était un si bon moment !

Dernières fois. Première fois… Etrange concomitance. Mon fils l’ainé, revenu en France, a démarré ce lundi même son premier vrai contrat de travail !

Autre concomitance : je vais arrêter ce blog au moment où j’arrête ma vie professionnelle. Ce n’était pas du tout programmé comme ça. Mais bien sûr c’est tout sauf un hasard. On aurait pu penser, et je l’ai cru un moment, que le temps libéré me donnerait envie de reprendre en force mon activité de blogueur. Il n’en est rien, au contraire. Ce qui l’emporte c’est l’envie de tourner la page, de tourner toutes les pages en même temps.

Je ne vis pas ce passage négativement. Je ressens au contraire une bonne excitation joyeuse même si elle est teintée d’inévitable mélancolie.

Les dernières fois ouvrent aussi sur des premières fois.

Enfin, c’est ce qu’il faut se dire…

 

30 juin 2011

Faites chauffer l'imprimante

 

Comme je l’ai déjà raconté à plusieurs reprises ce blog n’est pas écrit d’emblée dans l’interface de mon hébergeur mais dans un fichier word sur mon ordinateur. Dans un premier temps c’est donc simplement mon journal personnel même s’il est écrit en sachant qu’il est destiné, pour sa plus grande partie, à être mis en ligne dans les heures qui suivent. Je ne garde de côté que quelques entrées que je juge impubliables, soit parce qu’elles mettent en lumière des aspects de moi que je serais mal à l’aise de rendre publics, soit, parce que traitant d’événements ou de ressentis relationnels, elles évoquent de façon trop directe, insuffisamment allusive, des tierces personnes.

Ce fichier, grossi d’année en année depuis janvier 2003, compte maintenant près de 1300 pages serrées, en corps onze, un peu moins de 5 millions de caractères ! Il s’ajoute à un autre fichier de 300 pages, clos celui-là, qui est mon journal d’avant la mise en ligne, depuis le moment où j’ai repris en 1998 cette pratique, présente dans mon adolescence puis à divers moments de ma vie de jeune adulte (une trentaine de cahiers manuscrits datant principalement des années 70, pas d’ordinateur alors et je ne dactylographiais pas) puis totalement interrompue ensuite.

J’avais fait un tirage papier déjà d’une petite partie de ces fichiers, les années 1998 à 2003, en un seul exemplaire. Pour le moment c’est juste un gros paquet de feuilles volantes conservé dans une chemise et peu pratique à manipuler et que, tel quel, je ne relis pas. S’il m’arrive d’avoir besoin de références, de retrouver par exemple un commentaire de livre ou de film ou le souvenir de tel ou tel évènement personnel je fais plutôt une recherche textuelle dans le fichier de l’ordinateur ou sur le net.

N’empêche le week-end dernier j’ai mis de l’ordre dans ces fichiers, j’ai amélioré la mise en page, préparé des pages de garde, bref je l’ai rendu présentable pour une impression papier. Et hier matin puis aujourd'hui j’ai été très tôt à mon bureau et j’ai commencé, hors horaires de travail et avant l’arrivée des collègues, à faire chauffer imprimante et photocopieuse.

Même si je reconnais la formidable puissance de l’avatar numérique d’un écrit (puissance de consultation, de recherche, de circulation et d’interaction avec autrui), il n’empêche que pour moi un texte ne trouve son accomplissement, son achèvement, qu’à partir du moment où il est imprimé et relié.

Cela fait donc longtemps que je me dis que je finirai par imprimer ces textes mais je repoussais toujours, rebuté par le côté fastidieux, voire un peu mortifère de la chose. Là je m’y suis vraiment mis. L’approche de mon départ à la retraite me stimule. Pour des raisons très pragmatiques au premier abord : profiter de matériels performants et gratuits d’utilisation (je sais, ça ne se fait pas, j’utilise des moyens publics pour un usage privé, qui vole un œuf vole un bœuf, tout ça, tout ça, mais bon, une fois n’est pas coutume et je m’autorise cette petite entorse à mes principes de non mélange des genres jusque là respecté scrupuleusement). Au-delà de ces raisons pratiques, il y en a d’autres bien sûr, bien plus profondes, liées à ce changement important dans ma vie, cette étape franchie avec la fin de mon activité professionnelle.

Comme le besoin là aussi de finir quelque chose, de tourner une page.

Je sens que j’approche du moment où je vais finir ce journal. Je l’ai dit plus d’une fois.

La motivation n’y est plus vraiment sauf très épisodiquement. Plutôt qu’une continuation à toute petite vitesse qui n’est qu’une survie qui ne me satisfait pas, il me semble que je préfère à un moment donné dire « c’est fini » et m’y tenir.

Le besoin d’échange et de communication qui était devenu le moteur principal de l’écriture de blog a moins de puissance. Pour ce qui est de l’outil mémoriel pour moi-même, j’ai d’autres moyens que j’utilise déjà depuis un certain temps : noter sur un cahier quelques impressions rapides des films que je vois, quelques citations de livre que je lis, sans effort rédactionnel de mise en forme, juste pour moi. Quant aux considérations récurrentes sur moi-même, tous ces efforts pour, au travers des mots, chercher à mieux me comprendre, à descendre plus profondément en moi et pour tenter de trouver par ce biais des moyens d’amélioration personnelle et de mieux vivre, tout cela ne me semble plus rien pouvoir m’apporter. L’expérimentation d’une forme d’écriture qui doit dire sans dire, qui joue de l’allusion, qui pourra être interprétée différemment par diverses couches de lecteurs selon ce qu’ils savent de moi, le côté ludique et la jouissance particulière à glisser ici ou là une phrase qui fera écho chez quelques uns seulement, ne m’apporte plus le même plaisir qu’auparavant du fait même de l’appauvrissement de ma vie blogosphérique et de ce que je pouvais en attendre.

Mais alors pour que le cycle soit bouclé, pour ne pas avoir l’impression d’une sorte de déclin qui s’éternise indéfiniment, j’ai ce besoin de le clore en le figeant dans des bornes temporelles déterminées, ouvert par une préface, clos par une postface peut-être, organisé en une succession de volumes, inséré chacun dans leur reliure, agrémenté de tables des matières et d’index, bref j’ai besoin d’en faire un objet qui ressemble, au moins un peu, à un livre.

Le journal alors devient non plus accompagnement dans une durée indéfinie d’une vie vers son terme inévitable mais tranche de vie, expression d’un moment de soi. Le work in progress devient œuvre (sans qu’il faille voir aucune valeur spécifiquement appréciative dans le terme), œuvre accomplie, œuvre close, dont on peut, précisément parce qu’elle est close, se détacher pour passer à autre chose.

Tout ça ne veut pas dire que je ne reviendrai plus au journal, un jour ou un autre, sous une forme ou une autre, mais du moins aurais-je clos, d’une part, « Journal 1998-2002 » et, d’autre part, « Tentative d’un journal en ligne ; Les Échos de Valclair ; 2003-2011 ».

Cela veut encore moins dire que je n’écrirai plus et ne chercherai plus à partager des écrits. Et c’est cette clôture elle-même qui rendra plus facile d’aborder peut-être d’autres territoires d’écriture, parce que ce journal, devenu pensum, ne fera plus écran.

Je me suis interrogé sur le nombre d’exemplaires à tirer et finalement je me suis arrêté à quatre.

Il y en a deux qui seront pour l’Association pour l’Autobiographie, pas maintenant mais plus tard, quand ce qui est évoqué sera à une distance temporelle suffisante. Je suis attaché à la démarche de cette association, à sa façon de conserver pour l’avenir des bribes de vies de toutes sortes, témoignages de personnes ordinaires, façons diverses d’être au temps et au monde. Mes pages seront une trace parmi d’autres d’une façon de penser et de fonctionner au tournant du millénaire d’un quinqua à la vie professionnelle et familiale plutôt banale et plutôt heureuse, à laquelle toutefois il a toujours manqué un petit quelque chose, je ne sais trop quoi, un axe, une lumière. Au-delà de mes névroses particulières et de mes interrogations existentielles récurrentes, c’est un témoignage générationnel sur ceux dont l’adolescence a été portée par les enthousiasmes puis les désillusions post soixantes-huitardes et qui, peut-être, ne s’en sont jamais tout à fait remis. Et puis ces pages sont aussi un témoignage plus spécifique et, je crois, digne d’intérêt sur les pratiques d’écriture et les questionnements qu’elles ont pu susciter à ce moment historique particulier qui a vu la naissance puis la popularisation de l’écriture en ligne.

Les deux autres exemplaires seront pour moi d’abord puis pour mes fils. Enfin peut-être ! Un journal ce n’est pas un récit rétrospectif pour la postérité où, même si on se veut honnête, on ne peut qu’orienter le récit dans le sens de l’image qu’on veut laisser de soi. Les pages de journal au contraire ce sont au fil des mois et des années, les bonheurs et les réussites mais aussi les impuissances et les névroses, les faiblesses et les lâchetés, bref « le misérable petit tas de secrets » qu’on pourrait tout aussi bien enterrer avec soi. Il est bien plus difficile de laisser lire ce genre de choses à des proches, même après notre disparition, qu’à des chercheurs ou des curieux anonymes. On prend le risque d’ébrécher l’image que, volens-nolens, on a donné ou cru donner de soi. Mais d’un autre côté ce peut être précieux. J’aurais été heureux de trouver venant de mes parents, venant de mes grands-parents, quelquechose de leur vie, de leur ressentis et de leurs contradictions, même dans leurs aspects éventuellement les plus sombres, cela me les aurait rendus plus proches et plus amicaux, peut-être même y aurais-je trouvé matière à me construire.

Alors sans trop savoir ce que je déciderai au final, j’imprime deux exemplaires parce que j’ai deux fils et qu’il y a donc deux lignées potentielles. Ces documents simplement seront là dans ma bibliothèque, ils seront prêts au cas où je voudrais les transmettre et on verra bien.

On me dira que toutes ces considérations et théorisations montrent que j’attache une importance bien démesurée à ces textes. Ce n’est pas que j’ai de leur valeur une appréciation qui manquerait de modestie. C’est plutôt le reflet de ma propension à l’accumulation des traces et à la rationalisation de leur organisation que d’aucuns jugeront peut-être névrotique. Mais bon, c’est ainsi et l’essentiel pour moi, est que ce travail fait, je me sente satisfait de l’avoir accompli et que je m’en sente libéré.

 

25 juin 2011

Un rêve qui n'est pas d'aujourd'hui:

 

Je me suis tellement éloigné de mon blog, tellement éloigné même de mes écritures du quotidien, que les semaines se succèdent sans que j’y pense et sans qu’une quelconque mise à jour vienne rafraîchir ma page.

Farfouillant dans mes fichiers ce soir où je mettais un peu d’ordre sur mon ordinateur, j’ai retrouvé ce récit de rêve, écrit il y a plusieurs mois déjà, gardé dans le sas d’avant publication parce qu’au moment où je l’avais retranscrit, j’avais d’autres billets en cours et je l’avais oublié ensuite.

Du coup aujourd'hui je l’intègre dans mon journal car j’aime conserver et regrouper mes rêves et tant qu’à faire je le mets aussi en ligne car je trouve toujours amusant ces incongruités surgies de la nuit et parce que, même si c’est du réchauffé, ça fera un peu d’animation sur ce blog moribond.

Le voici tel que je l’avais écrit au saut du lit et retranscrit sans la publier le soir même :

Je suis dans une fête dans laquelle je ne connais pas grand monde et m’ennuie plutôt. Je veux me resservir à boire mais les bouteilles sont vides. Dans l’entrée il y a de petits tonnelets encore approvisionnés. Une jeune femme vient boire. Elle s’allonge sous le robinet. Il ne coule qu’un liquide très clair. Nous réalisons que ce n’est que de l’eau, elle est très déçue et moi aussi.

L’endroit donne en contrebas sur un vaste amphithéâtre. Il y a une estrade en bas, sur laquelle Sarkozy fait un discours. Il n’y a qu’une quinzaine de personnes qui l’écoutent vraiment, pas mal de gens qui vont et viennent dans les travées sans guère se préoccuper du discoureur. Ça la fout mal, c’est quand même le Président de la République ! Je me sens écartelé entre la détestation que j’ai du personnage et la révérence que je ne peux m’empêcher d’avoir pour la fonction. J’ai envie de descendre l’écouter ne serait-ce que par curiosité mais ça m’embête, j’ai envie aussi qu’il puisse sentir ce mépris qui l’environne.

La fille sous le tonnelet n’est pas spécialement belle mais elle m’attire. Sa robe se soulève brusquement puis retombe mais j’ai le temps de voir qu’elle est entièrement nue dessous. Je m’allonge contre elle. Je lui dis, non sans être un peu surpris par mon audace: « j’ai envie de faire l’amour avec toi, mais ça me paraît un peu incongru, je ne te connais pas ». Elle me fait un sourire, un merveilleux sourire très éclatant, mais un sourire amical, un sourire que je ne ressens pas comme une invite. Elle me dit simplement : « c’est gentil de me le dire ». Je suis content car je craignais qu’elle ne me repousse violemment. Je me serre juste un peu plus contre elle. Elle aussi répond à mon étreinte, se serre un peu plus fort, mais tous les deux nous avons le sentiment d’en être à la tendresse amicale et que peut-être nous allons en rester là…

En tout cas c’est là-dessus que je me réveille !

Un poil trop tôt sans doute !

Peut-être pas au fond !

6 juin 2011

Se laisser vivre

 

Le temps encore a filé sans que je le voie passer. Je n’ai pas été spécialement occupé pourtant, je ne suis pas parti en week-end et j’ai disposé de temps libre car, outre le jeudi férié, je ne travaillais pas vendredi.

Pour autant je n’ai pas écrit une ligne quels que soient les vagues projets qui flottent dans ma tête. Je n’ai pas été lire les blogamis. A vrai dire c’est à peine si j’ai ouvert mon ordinateur et j’ai même laissé passer plusieurs jours sans aller consulter mes mails.

L’écriture et l’ordinateur sont donc plus que jamais à distance. Ce n’est pas dû à une spéciale intensité de vie, non je ne suis pas dans ces moments qui font dire : « ah mais, je vis, je vis, quel tourbillon, alors se regarder le nombril, regarder le monde, écrire, tout ça, bof, j’ai bien mieux à faire… »

Pour autant je ne me suis pas senti dans le malaise comme parfois, lorsque j’ai l’impression de patauger dans la dispersion ou dans l’apathie. Il me semble que simplement je me laisse vivre. Doucettement. Tout doucettement !

Au bureau tout est plutôt calme pour moi en ce moment, avant la période d’intense commissionite et réunionnite à laquelle je ne couperai pas pendant la seconde partie du mois. Oserais-je dire que je me suis mis dans une attitude mentale de pré-retraite ? Il y a de ça. Je tire les dernières longueurs sans enthousiasme. Il me reste un petit mois de vrai travail jusqu’au 8 juillet puis il y aura une semaine fin aout mais là ce sera classement vertical et préparation de mon départ.

J’aurais pu m’attendre à ce que cette baisse de pression soit favorable à une implication accrue sur d’autres terrains, sur d’autres projets et spécialement sur les plus personnels, notamment l’écriture, ce livre, ces livres peut-être, dont je me dis depuis longtemps que je les écrirai lorsque j’aurai le temps ! Il n’en est rien. Est-ce juste un sas de décompression inévitable ? Est-ce l’entrée dans un autre temps de la vie où rêves et projets s’étiolent, où l’on se contente du quotidien tel qu’il vient, qu’on s’efforce juste de rendre le plus plaisant possible ? Sont-ce nos intérêts eux même qui changent, rendant moins désirable tout ce qui viserait à l’affirmation de soi par la réalisation d’une « œuvre » même sans prétention, toute petite et toute dérisoire qu’elle soit, mais qui, du moins, serait une marque, une trace à laisser de soi ? Je n’en sais rien et refuse de m’en torturer la tête. Ça aussi c’est symptomatique !

Mon week-end n’a pas été inactif pour autant. Une randonnée à Fontainebleau vendredi, rien de très spectaculaire, cinq heures de marche tranquille, suffisamment pour me rendre compte que j’avais le pied et le mollet bien rouillé ; des courses diverses, vêtements, chaussures de marche justement, bref la panoplie de l’été ; l’accueil d’une amie lyonnaise venue faire découvrir Paris à sa petite nièce, quelques bons moments conviviaux partagés avec elle ; du temps de lecture tranquille à l’ombre sur ma terrasse : « Ecritures de l’intime », un bouquin collectif auquel Coumarine a participé et qui offre nombre de perspectives intéressantes et puis, dans un tout autre registre, « Trois femmes puissantes » de Marie Ndiaye. C’est le premier bouquin que je lis de cette auteure et je ne sais pas vraiment ce que j’en pense. Il y a à la fois un style original, puissant justement, fait de retours et reprises, comme une sorte de litanie par laquelle les personnages sont dévoilés peu à peu, de plus en plus en profondeur, jusqu’au cœur de leurs échecs et de leur névroses. C’est assez fort mais quelque chose me gêne, dans la construction peut-être, ce sont trois histoires suspendues qui restent un peu en l’air et rattachées entre elles de façon très artificielle. Tout ça fait que je suis resté un peu sur le seuil de ces récits, sans adhérer vraiment et que j’ai éprouvé une certaine déception en refermant le livre.

J’ai été un peu au cinéma aussi : « Belleville-Tokyo » un petit film pas désagréable mais qui sera vite oublié. Et puis la fameuse et controversée palme d’or de Cannes « The tree of life ». Je me range plutôt dans le camp des détracteurs. Je reconnais que les images sont très belles, qu’elles sont montées en de magnifiques séquences qui constituent autant de somptueux poèmes visuels. La façon de filmer la lumière, les arbres sur le ciel, la ville provinciale des années 50, les immeubles de verre et de métal de la mégalopole d’aujourd'hui (séquences particulièrement belles !), les paysages de déserts ou de bords de mer, tout cela est époustouflant. Le final est visuellement particulièrement somptueux, ce passage du sas de la vie dans la mort, cette chorégraphie sur la plage des personnages qui se retrouvent par delà les âges de la vie est d’une grande beauté. Mais cela à mon sens ne suffit pas. Indépendamment même de la fameuse interminable séquence qui évoque l’histoire de l’univers depuis la formation des galaxies jusqu’à la naissance du petit homme (sans oublier de passer par la case dinosaure !) je trouve la symbolique de l’ensemble très lourde. Il y a des séquences émouvantes sur l’enfance, la fratrie, la difficulté d’être et de grandir dans le contexte de l’Amérique réactionnaire des années 50 entre une mère douce mais écrasée et un père aimant mais rigide et violent. Mais le propos trop pesant finit par éliminer même cette émotion. Les personnages ne sont plus que des archétypes, on est au spectacle, on se berce de somptuosité visuelle mais sans plus se sentir ému ou concerné. Sans doute fallait-il distinguer Terence Mallick car son œuvre est puissamment originale mais peut-être plutôt qu’une Palme d’or aurait-il fallu pour lui un prix spécial ou bien une distinction qui n’existe pas comme un grand prix de l’image ou du poème visuel !

23 mai 2011

Envie de campagne et salles obscures

 

Hier dimanche, matin radieux. A huit heures sur la terrasse, j’installe le petit déjeuner, il fait délicieusement bon. Ce qui risque de ne pas durer, car il fait trop chaud déjà pendant les journées, d’une chaleur qui n’est pas de saison, comme si le printemps avait été zappé. A Paris, comme dans toutes les grandes villes, c’est vite pénible, étouffant dès qu’il fait chaud. (Et je l’ai ressenti particulièrement cet après-midi, sortant du boulot vers cinq heures, air pesant, la pollution s’y sent d’emblée qui irrite les yeux.)

Mais à l’heure matinale hier, quel régal ! Le café odorant, le jus de fruit, les croissants frais achetés à la boulangerie, le chant des merles, le jasmin qui commence à embaumer, remplaçant le chèvrefeuille dont la floraison est sur le déclin…

Je suis sur cette terrasse dans un espace privilégié, comme un petit coin villageois au cœur de la ville. Mais me saisit pourtant une envie violente de partir, de me balader dans la nature, les paysages changeants au détour de petites routes de campagne, l’envie de haltes à des terrasses d’auberge, l’envie de forêts profondes ou de vastes espaces au contraire qui n’arrêtent pas le regard, une envie de grandes marches, de montagnes à gravir ou d’une côte à longer, une envie d’explorations, de paysage nouveaux, de lieux à découvrir, une envie de me carapater loin…

Ce n’est pas pour aujourd'hui et pas pour tout de suite mais, bon, ça vient…

En attendant il y a les voyages cinématographiques et ces derniers jours il y en a eu beaucoup. Ça c’est l’effet Cannes qui titille mes envies et me pousse plus encore que d’habitude vers les salles obscures. Un film tous les soirs, il y a là un côté consommation, accumulation culturelle qui finit par lasser, de là peut-être aussi ces envies de grands espaces réels et non seulement filmiques, l’envie du monde par mes yeux mêmes, l’envie du corps en mouvement, l’envie du vent sur le visage, du ressenti de la marche, de la fatigue dans les pattes.

Mais, tout de même, ne boudons pas notre plaisir j’ai vu des films intéressants et je me booste ce soir pour en dire quelques mots.

« Midnight in Paris » : Bof, le moins intéressant des quatre films vus. C’est du Woody Allen, ça ne peut pas être mauvais, on passe toujours un moment plaisant ce qui n’est déjà pas mal. Il y a le plaisir de découvrir Paris, celui d’aujourd'hui et celui des années 20, au miroir de l’imaginaire des francophiles américains. Il y a comme toujours l’art du dialogue et des situations, la drôlerie des oppositions entre personnages typés. Mais le film est moins rapide que d’autres fois, la construction moins brillante, il suit une thématique unique d’où finalement une certaine répétitivité. Il fait sourire et rêver et comporte sa touche d’émotion, surtout vers la fin, mais d’une façon plus superficielle et téléphonée que dans d’autres opus. Ce serait bien que Télérama cesse de crier au génie par principe, parce que c’est du Woody Allen !

« La balade de l’impossible » : J’ai bien aimé. J’avais aussi beaucoup aimé le livre. Il y a un louable effort dans la façon même de filmer, dans la façon d’agencer les scènes pour tenter d’être dans la tonalité du livre, pour faire ressentir la présence nostalgique du passé, l’impossibilité à jamais y revenir, à retrouver les amours perdues. Je trouve en général oiseux le débat récurrent sur films et livres, ce sont deux arts différents et qui jouent sur des registres différents au point que la comparaison est souvent dépourvue de sens. Mais ici tout de même il me semble que la littérature est plus forte que le cinéma, les mots écrits laissent plus de place à l’imaginaire pour remplir les blancs, nos propres ressentis se déploient plus facilement dans les creux du texte que dans l’entre deux des images, la part de mystère des personnages qui les rend d’autant plus attirants y est mieux préservée. Cela m’a frappé particulièrement dans les évocations par les jeunes femmes de leur sexualité, de leurs envies, fantasmes ou blocages. Ce sont pourtant les mêmes mots que dans le livre. Mais là où, sans pourtant rien perdre de leur éventuelle crudité, ils se glissaient dans une sorte d’aura poétique, ils accompagnaient le mystère des personnes, ici ils m’ont paru plus secs, plus lourds, comme trop insistants, les rendant moins crédibles et moins émouvants au spectateur qu’ils ne l’étaient au lecteur.

« La conquête » : Je me suis régalé. On baigne dans le spectaculaire de la politique, on jouit d’assister aux premières loges aux combats entre des grands fauves qui se haïssent. Le réalisateur évidemment n’était ni dans la conscience de Nicolas Sarkozy le 6 mai, ni caché sous les tables lors des têtes à têtes entre rivaux. Mais si l’on rapporte le spectacle aux souvenirs que l’on garde des affrontements effectifs et publics comme de tout ce qui avait transpiré de la crise de couple de Sarkozy dans la même période, force est de constater que ce vraisemblable qui nous est présenté prend une extraordinaire force de vérité même s’il ne prétend pas la retracer. Le film repose aussi sur une performance extraordinaire d’acteur. Podalydès est exceptionnel, il n’est pas spécialement grimé pour apparaître comme un sosie de Sarko, au contraire il en reste volontairement distinct ce qui rend d’autant plus troublant la façon dont il s’empare du personnage au travers de sa gestuelle et de son phrasé.

« Le gamin au vélo » : un bon Dardenne. En entrant dans le cinéma, on se dit, ça va être toujours un peu le même film, la même ambiance un peu misérabiliste, les même types de personnages malmenés par la vie et peut-être que l’on va s’ennuyer. Mais non, pas du tout. Le film nous scotche littéralement, passé quelques moments d’inquiétude au tout début. La mise en scène est d’une remarquable efficacité, tout à l’énergie, sans la moindre graisse, sans temps mort, on ne s’appesantit pas sur des explications, la caméra se contente de montrer, de suivre les personnages au plus près de leur pérégrinations. C’est à la fois très sombre et pas désespéré du tout. Le geste gratuit existe, le geste de pur amour qui ne demande rien. Le film tient aussi beaucoup au jeu du jeune acteur, vraiment excellent, qui nous fait ressentir la profondeur de sa blessure d’amour trahie, l’intensité de sa violence sous les différentes formes qu’elle prend, soit qu’elle tente de s’évacuer en corps à corps avec son vélo, soit qu’elle reste rentrée, soit qu’elle éclate de façon spectaculaire. Mais il nous laisse aussi deviner derrière cette carapace que lui fait la dureté de sa vie, son besoin de tendresse et sa capacité finalement à accueillir l’amour qu’on lui porte.

De ces quatre films, je me rends compte en écrivant, que c’est celui que je trouve le plus fort, celui sans doute qui restera le plus marqué en moi.


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18 mai 2011

Climat

 

Comme beaucoup j’ai été sidéré, au sens fort de la sidération véritable, par cette affaire DSK et je le reste, en partie, même si je commence à faire le deuil, à prendre de la distance.

Lorsque j’ai entendu l’information à la radio, j’ai d’abord été incrédule, je me suis dit, c’est un mauvais rêve, c’est un cauchemar.

Même impression ensuite lorsque j’ai vu ces photos de série policière américaine, avec ce type effondré, hagard, entre les flics ou dans la salle d’audience, sauf que ce n’était pas une série policière, ce n’était pas une fiction.

C’est effrayant cette façon de pointer le suspect, de jeter son image en pâture, au mépris de toute présomption d’innocence, marquant ainsi la personne de façon quasi indélébile même si elle devait ensuite être mise hors de cause. Le déséquilibre, en tout cas en début de procédure, entre l’accusation et la défense ma parait aussi très choquant. Notre système judiciaire, malgré toutes les critiques qu’on lui porte, me parait tout de même bien plus équilibré.

Mais, au-delà, il y a le fond de l’affaire, ce qui s’est passé dans cette foutue chambre d’hôtel.

Je voudrais croire que c’est une manipulation, que c’est un piège.

Mais même si c’est le cas, même s’il s’est fait envoyer dans les pattes une Mata-Hari de circonstance, il n’empêche qu’il est tombé dans le piège, ce qui est signe de faiblesse, signe d’une non maîtrise de soi qui en elle-même suffirait à le disqualifier. Et de façon d’autant plus cruelle qu’il semblait conscient dans une interview récente du risque d’être confronté à ce genre de circonstances !

Si par contre, ce n’est pas un piège, si c’est juste un viol, juste un viol sordide, alors là…

Docteur Jekill et Mister Hyde !

D’un côté, le brillant intellectuel, l’économiste de haute volée, le dirigeant politique, l’un parmi les plus puissants du monde, le possible, le jusque là vraisemblable futur président de la République Française, dont on peut ne pas partager toutes les orientations mais qui semblait néanmoins pouvoir conduire une politique un tant soit peu différente,

Et de l’autre un homme gouverné par ses pulsions, jusqu’à en perdre les pédales, jusqu’à basculer dans la violence sur autrui, un homme malade, ni plus, ni moins qu’un quelconque pédophile ou violeur ou tueur en série, de ceux qui disent lorsqu’on s’empare d’eux: « je ne m’appartenais plus » !

Difficile de faire coller les deux images, l’homme éduqué et rationnel et le compulsif irrépressible, d’où le trouble plus général et l’ombre que l’évènement, s’il se révèle avéré, jette sur toute chose, faisant douter de tout, de tous, comment faire confiance et à qui, rappelant à chacun les monstruosités potentiellement tapies dans la psyché des hommes.

Et l’on entend d’ici redoubler les « tous pourris » de Marine qui vont encore lui permettre de grappiller quelques points supplémentaires.

Tout ça fait un drôle de climat, drôle n’étant pas vraiment le terme approprié !

 

12 mai 2011

A distance

 

Décidément, je suis à distance.

Une fois encore j’ai laissé passer des jours et des jours sans aller dans le blogomonde. Pendant une bonne semaine, je n’ai pas ouvert les blogs amis, je n’ai pas même ouvert le mien, ne serait-ce que pour aller voir si j’avais des commentaires. Je me suis rendu compte de ma propre absence en découvrant l’autre jour deux spams bien installés en commentaires depuis plusieurs jours sans que j’ai réagi !

C’est un éloignement auquel je ne pense même pas. C’est juste comme ça et je n’ai pas envie de le questionner, de me lancer dans des considérations sur un éventuel assoupissement collectif de la blogosphère et sur mes propres oscillations dans mon désir de communiquer et dans mon rapport à l’écriture, tout ça je l’ai fait ici ou et je reste il me semble globalement dans une même disposition d’esprit.

Cette nouvelle absence est seulement le signe d’un éloignement qui, malgré quelques beaux retours de flamme, ne cesse tout de même, de mois en mois, de s’approfondir.

Je ne suis pas un homme de rupture, je n’ai jamais été enclin à quitter, ni sur le plan professionnel, ni sur le plan relationnel.

Pas plus donc ici ne dirais-je : j’arrête.

Je me laisse juste aller au fil de la pente et force est de constater que c’est la pente de l’éloignement.

Évidemment parfois je me dis que tel ou tel film, tel ou tel livre mériterait que je me décarcasse un peu et que je donne mes coups de cœur en partage. Ada m’a gentiment rappelé ce que pouvait avoir de précieux ce genre de billet.

Alors je vous dirais juste en deux phrases que Tomboy est un film magnifique, d’une extrême sensibilité et délicatesse, sans doute très nourri de souvenirs autobiographiques. Ne le manquez pas. Mais Traou, sortie de sa retraite de blogueuse, en a déjà excellemment parlé.

Et que l’exposition Cranach aussi est à la fois intéressante et superbe, qualité du trait et de la composition, richesse des thématiques et de leur entrecroisement parfois contradictoire dans une même toile, beauté des corps nus ou somptueusement mis en valeur par les costumes, troublant érotisme subliminal ou assumé des corps mais aussi des demi-sourires énigmatiques des femmes...

Ceci ne nécessiterait pas vraiment un billet qui peut-être n’est là que pour dire : j’existe encore…

 

3 mai 2011

Anecdotes ferroviaires

 

Vendredi 29, dans le TGV…

Départ de Lyon tout à l’heure. Averse orageuse qui strie les vitres. Stress ambiant. Beaucoup de monde sur les quais, bousculades, désorganisation liées à des retards de certaines correspondances. Une femme arrive au dernier moment, affolée, avec son jeune fils. Elle a mon numéro de place. Y-a-t-il une erreur sur la voiture ? Non ! Alors le train ? C’est bien le train de Montpellier ? Non ! Nous allons à Paris. Affolement. Mais le train, déjà en retard d’une bonne dizaine de minutes s’est ébranlé. Elle se précipite, court à la recherche du conducteur en criant : stop, stop ! Les autres voyageurs compatissent. Elle disparait au bout du couloir. Je ne la reverrai pas. Et le train bien sûr ne s’est pas arrêté. Sacré détour ! J’imagine ce qu’aurait été mon énervement devant une telle mésaventure ! Je vois ce qu’il en est déjà, lorsque parfois il m’arrive de prendre une mauvaise bretelle d’autoroute et de me retrouver piégé pendant des kilomètres. Le sentiment d’être embarqué sans pouvoir rien faire est l’un de ceux qui m’est le plus désagréable. Je ne sais si en plus cette femme a dû payer pour son détour. J’imagine que oui. C’est un peu rude !

Beaux ciels ensuite après la pluie. Les beaux et très verts vallonnements du charolais, piqués des tâches blanches des bœufs, les villages regroupés autour de leur clocher, très France de la force tranquille. Puis maintenant de plus molles ondulations, des espaces en openfield bordés par des forêts résiduelles, un vaste patchwork de couleurs, le jaune du colza, les verts différents de plusieurs sortes de céréales que je ne sais pas distinguer. De belles lumières toujours, entre soleil et nuages, un soleil rasant puis un soleil maintenant qui n’éclaire plus le sol mais ourle de lumière les nuages au-dessus de nos têtes…

J’ai un livre aussi pour viatique, « L’enfant des ténèbres » d’Anne-Marie Garat. J’avais beaucoup aimé le précédent opus de la saga, « Dans la main du diable ». J’avais été scotché par l’art du récit de l’auteur et par sa capacité à évoquer une époque et à faire vivre des personnages, des lieux, des mondes multiples, du vrai roman à l’ancienne. J’accroche moins ici, peut-être parce que je mène cette lecture de façon plus discontinue. Ou bien aussi parce que les procédés finissent par me lasser, la multiplicité des épisodes avec trop de personnages secondaires moins solidement arrimés au propos central, les flashback un peu trop systématiques, un style brillamment descriptif mais qui fourmille un peu trop d’adjectifs.

Il faut dire que ma journée a été longue. Je suis levé depuis six heures, je me suis concentré ensuite toute la journée sur des problèmes d’indexation et de bases de données, ce n’est pas exactement du travail au sens où ça n’a rien à voir avec mon activité salariée mais beaucoup avec mon activité d’après, librement choisie. Ce qui explique aussi que j’ai eu tendance par moments à piquer du nez sur mon livre. Mais ensuite, de m’être mis à écrire, et avec rapidité, fluidité et plaisir, pour accrocher quelque chose de l’instant ferroviaire m’a réveillé.

Dans la diagonale à deux rangs de moi, il y a une femme au regard fixe toujours dirigé dans ma direction. Je regarde le paysage, je jette un œil sur elle, je lis quelques pages, je jette un œil sur elle, j’écris quelques lignes, je jette un œil sur elle, et toujours, toujours, son regard imperturbablement posé sur moi. Impression étrange et désagréable. Qu’est-ce qu’elle me veut ? En vérité je ne suis pas sûr qu’elle me voie. Son regard me traverse et se perd dans le vide, c’est comme si j’étais transparent, inexistant, ce qui n’est pas plus agréable. Elle n’a rien d’amène, cette femme, et ce regard vide et fixe dégage une oppressante tristesse. Et ce qui est étrange c’est que, tout à coup, elle me fait penser à quelqu’un que j’ai connu il y a très longtemps. Quelque chose dans les traits de son visage, dans l’aspect général de son corps me semble comme remonté du passé. Je me dis un instant : est-ce que ce pourrait-être elle et ce regard alors me serait-il véritablement destiné, serait-il une interrogation ? Evidemment non ! Ce n’est pas elle, sinon nous nous serions reconnus par des échanges de vrais regards. Et puis depuis plus de vingt ans que je ne l’ai vu, elle a dû changer forcément, ses traits de septuagénaire ne pourraient plus être ceux de la quadra qui est en face de moi. Troublant tout de même. Et de plus en plus désagréable. Je regarde ailleurs pour tenter de ne plus sentir ce regard absent et qui, pourtant, me pèse.

Mais le train est à l’approche. La voici qui range le livre qui est devant elle et qu’elle n’a pas ouvert du voyage, la voici qui se lève, se tourne et s’éloigne. Je me sens comme allégé, comme libéré, non sans me demander ce que cachait ce regard fixe, une atteinte neurologique, une immense fatigue, une insondable tristesse…

C’est ce que j’aime des voyages en train, tout ce qu’ils permettent de rêveries et de voyage dans le voyage !

 Ecrit sur mon carnet dans le train vendredi, peaufiné et retranscrit ce matin à l'aube, merci l'insomnie matinale!

24 avril 2011

Retour pascal

 

Je suis de retour depuis vendredi dans la nuit.

Ce n’était pas facile de s’arracher. J’ai eu du mal en fermant les volets de la maison. Je n’étais pas encore en manque de Paris. M’y voici, prêt à aborder ce dernier trimestre de vie professionnelle qui s’annonce très chargé. Ensuite, après les vacances, il y aura encore une semaine au bureau fin aout, mais alors ce ne sera pas pareil, je ne me sentirais plus vraiment en charge, je viderai mon bureau, j’accueillerai mon successeur.

Dernier trimestre ! A la fois sentiment d’une libération, d’une nouvelle page et mélancolie de l’irrémédiable, de ce qui est passé et ne repassera pas. Il y a toujours une sourde angoisse à écrire le mot « dernier ».

Reconnexion depuis hier. Prise de vue de ma blogosphère. Il y aurait tant à lire et parfois, ici ou là, à commenter. Je ne fais que passer. Toujours cette même impression de ne pas être dans le bon équilibre, de ne pas bien gérer la multitude des sollicitations. Bon, il faudrait circuler dans tout cela, avec simplicité, avec légèreté, juste en fonction des envies et seulement des envies et tant pis si le temps tourne, si l’on ne fait pas ce qu’on s’était dit qu’on allait faire.

Pour l’instant je mets en ligne mes deux billets écrits là-bas.

Puis je file chez belle-maman qui nous attend pour le repas de Pâques, une journée très importante pour elle et qu’elle ne conçoit pas de passer, après la messe, sans être entourée d’au moins une partie de ses enfants et petits enfants. Pâques, le renouveau, la résurrection, oui, il serait bien de pouvoir le ressentir comme ça. Parfois passent en moi comme des fantasmes de ces temps révolus, de ces temps où tout paraissait simple, où la vie s’écoulait dans la tranquillité des certitudes, cadrée par les croyances et les rites…

 

21 avril 2011

Chez nous

 

Après ce bref séjour à Sète nous voici « chez nous ».

De moins en moins je dis la maison de mes grands-parents et de plus en plus je dis « chez nous ». Je m’approprie psychologiquement cette maison ce qui n’était pas forcément évident au départ. Peut-on se mettre dans les pas de ceux qui nous ont précédés et se sentir chez soi et non pas comme en visite, comme en occupant illicite ? A modifier la disposition, le mobilier, l’esprit du lieu ne trahit-on pas et si on le conserve au contraire tel qu’en lui-même peut-on se sentir vraiment chez soi ? L’incendie il faut dire à fait beaucoup pour nous aider, ne laissant pas d’autre choix qu’une rénovation radicale et surtout en nous donnant la possibilité financière de le faire.

Une chose est sûre, je me sens très bien ici et j’ai de plus en plus envie de ne pas trop traîner pour en faire mon point d’attache principal. Les réticences qu’avaient Constance à venir s’installer ici s’effacent (sans doute a-t-elle perçue que de mon côté la décision qui murissait lentement avant l’incendie est devenue irrémédiable, dès lors qu’on se lançait dans les travaux de rénovation) mais elle est manifestement beaucoup moins pressée que moi de quitter Paris. J’aurais volontiers migré dès cet automne, nous attendrons le suivant.

Le temps a été merveilleux pendant la plus grande partie de notre séjour. Fraîcheur du matin, fond de l’air doux mais soleil généreux et déjà chaud. Repas du midi pris sans difficulté au jardin, celui du soir à l’intérieur encore. Dehors les floraisons, les iris et l’odorante glycine et même, inattendu, dans une plate-bande les clochettes délicates d’une bonne dizaine de pieds de muguet arrivés là par quel hasard. Le matin le soleil qui entre à pleines brassées côté chambre, illuminant l’éveil et, depuis la baignoire inondée de lumière, la vue du ciel et le balancement doux des branches du cèdre du jardin (quel contraste avec ma minuscule salle de bains parisienne sans air et sans lumière du jour !). L’après-midi et le soir soleil au contraire côté de la place, côté séjour et bureau, dorant les meubles. J’aime à m’y tenir dans ce bureau, à y lire ou à y écrire. Ne manque plus que l’abonnement internet mais ce sera pour cet été.

Nous sommes encore très occupés. Nous avons les dernières visites d’entreprise avec quelques queues de travaux, petites bricoles qui étaient restées en suspens et quelques erreurs ou malfaçons à faire corriger. Reste l’aménagement intérieur. Nous y travaillons mais à un rythme choisi, sans bousculade. Nous avons remis les tapis, raccroché quelques cadres, ressorti quelques bibelots. Pour d’autres on attend, on va voir ce qu’on a envie de remettre, pas tout certainement, on apprécie les pièces pas trop chargées et qu’il y ait des espaces nus et des respirations, cela nous change de Paris où les livres et les objets, dans un espace évidemment beaucoup plus resserré nous étouffent.

On a été pas mal occupé aussi par la lutte contre le petit peuple des mites ! On s’est aperçu que les deux meilleurs sommiers et les deux meilleurs matelas de la maison, dont ceux du lit que l’on occupe, en étaient infestées ! Malgré les traitements appliqués tout de suite mais à l’efficacité manifestement très relative, on retrouvait chaque matin des larves bien vivantes, alors, chaque matin, literie défaite, matelas tournés et retournés, coup de bombe antimite et branlebas d’aspirateur ! En partant on a appliqué un traitement de cheval, emballé couvertures et tapis des chambres dans des sacs plastiques fermés avec du produit. Pas sûr que notre puissance de feu en sera venue à bout ! On verra bien. Agaçant mais il faut en sourire.

Les deux derniers jours le temps a changé. Le ciel était toujours aussi bleu mais le vent d’Autan s’est mis de la partie. Il est toujours spécialement violent dans notre petite ville, on y marche courbé quand on est face au vent, il heurte de plein fouet la maison côté jardin, le choc contre la façade crée des tourbillons, ça mugit et ça secoue de partout, ce ne sont plus balancement doux des branches des arbres et toutes les fleurs de la glycine ont été dispersées, pas question de laisser les fenêtres ouverte et même il faut tenir les volets fermés pour éviter qu’ils ne claquent. Pas moyen évidemment de déjeuner dans le jardin ou d’aller y lire le journal mollement installé sur une chaise longue. Au printemps il n’est pas encore chaud comme il l’est l’été (ce qui le rend alors particulièrement désagréable), et du coup quand on met le nez au jardin on se croirait presque en Bretagne par temps de tempête, l’air marin en moins. Constance déteste ce vent, moi je m’en accommode plus facilement mais je dois bien reconnaître que quand il souffle plusieurs jours d’affilée il finit par porter sérieusement sur les nerfs. Mais bon il faut bien que le lieu ait tout de même son petit inconvénient !

Demain, retour Paris !


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La glycine, avant le vent, et, au gré d'une promenade, un petit cimetière de campagne qui me touche bien plus que le cimetière marin...

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Les échos de Valclair
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